Mémoires de supporter : Du bonheur aux larmes

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Du haut de mes vingt ans, on peut dire que j'ai rarement connu la joie avec le Racing. La tristesse a fait très souvent de l'ombre à l'allégresse, mais malgré tout, le club reste plus que jamais gravé dans mon cœur. Aujourd'hui, je vais vous faire vivre ce que j'appelle, une parfaite “sad ending”, de mon point de vue.

De mon canapé à la fan zone

On retourne quelques mois en arrière, en mai 2019. Le 17 mai, la Ligue 2 ferme ses portes avec son traditionnel multiplex, auquel participe le Racing, qui doit valider sa place en play-off. Ce soir-là, je suis chez moi, seul dans mon studio amiénois, pour suivre mon club de coeur face à Orléans. Après une rencontre maîtrisée et un score fleuve (5-2), le Racing prend place aux play-offs, dans la pire position, celle de 5ème. Ainsi, pour retrouver la Ligue 1, il y aura 3 adversaires à passer, en 4 matchs, soit au minimum 360 minutes, que je n'ai pas loupée d'une miette. Je dis au minimum, car deux prolongations ont eu lieu, soit un total de 420 longues minutes à supporter le Racing.
Le premier match voit les Sang et Or et sa horde de supporters se déplacer à Charléty, pour y affronter le Paris FC. De chez moi, je ressens toute la ferveur que les Sang et Or, dont certains d'entre vous, ont amené avec eux en région parisienne. Une ferveur récompensée, tard dans la nuit, avec le tir au but victorieux de Guillaume Gillet, qui libère les nôtres, vous, et moi-même, qui a poussé un hurlement de joie après son but (Je m'étonne encore que mes voisins n'ont pas appelé la police!).

C'est fait, les Lensois passent le premier tour, et vont au deuxième, où Troyes les attendent de pied ferme. Le match contre Troyes, je ne l'ai pas vécu seul pour une fois. J'étais chez une amie, qui n'est pas branchée football, mais qui m'a laissé vivre mon match (bien que je suis toujours à penser qu'elle a dû me juger de nombreuses fois...). Un match encore tendu, plus que tendu, où notre Jean-Louis Leca est expulsé. Il a fallu encore une prolongation pour arriver à nos fins, et être de nouveau libéré, par notre super sub, Simon Banza. Ça y est, plus que 2 matchs. Mais comment vont-ils y arriver, eux qui ont joué plus de deux matchs et demi en seulement deux rencontres, et qui n'ont pas leur gardien titulaire ?
Encore une fois, le match aller de ce dernier tour, je le vis seul, chez moi, mais je sais que les supporters vont pousser leurs joueurs, nos joueurs à la victoire. A la TV, on voit le kop plein, bondé. Et intimement, je suis convaincu qu'ils vont le faire. Malheureusement, mon intuition me tient en échec, comme les Sang et Or face à Dijon, où ces derniers font match nul dans l'ambiance démentielle de Bollaert.
Maintenant place au retour...  

11 minutes de silence profond

Pour le retour, nous décidons, avec quelques amis et connaissances, de mettre les petits plats dans les grands, et d'aller à Lens, vivre cet ultime match, cette finale, dans la fanzone prévue à cet effet, pour faire de ce 2 juin 2019, un jour inoubliable. Toute la journée, je ne pensais qu'au match, j'étais stressé, plus que pour les résultats au Bac, surtout que rares ont étaient les fois où j'ai pu aller à Lens, faute de transport. Tellement stressé, que sur le trajet entre la Somme et le Pas de Calais, je n'ai pas parlé énormément, moi, qui, d'ordinaire, aime bien parler. Ma langue se délie en arrivant sur Lens, où je vois la horde de supporters se rendre à la fanzone. L'excitation monte peu à peu.On est une petite dizaine en tout à avoir fait le déplacement. Après la fameuse bière d'avant-match, on se décide de rentrer à notre tour dans la fanzone, moi portant fièrement mon écharpe, et un vieux t-shirt à l'effigie d'Eric Sikora, captain Siko, qui je mets tel une cape. J'arrive même à croiser deux de mes cousins venu de l'Oise pour la rencontre. Le Racing, c'est avant tout une histoire de famille. 

Avant la rencontre, on se chauffe la voix, avec les milliers d'autres supporters. 
Et bizarrement, je sens le vent tourner. Ma première indication est celle du report du coup d'envoi, à cause d'un problème technique dans le parcage visiteur du stade Gaston Gérard. Étant du genre superstitieux, je n'aime pas trop les accrocs. La pression montre, on commence à tous chanter, en commençant par La Lensoise. Après cela, ça y est, le match est lancé.
La foule est dense, surexcitée, des fumigènes sont craquées dans la fanzone, et on sait qu'on va être en transe pendant minimum 90 minutes. Dans le onze de Dijon figure un ancien lillois, Florent Balmont. Dès qu'il touche le ballon, on le siffle et j'en profite pour lui lancer mes plus beaux compliments, un running-gag qui aura bien fait rire mes amis et les supporters autour de nous. J'avais peut-être porté l'œil, car Dijon ouvre le score peu avant la demi-heure de jeu (28', 1-0).
Vous connaissez le terme “se prendre une clim” ? Elle n'avait jamais été aussi réelle. D'un coup, je me suis tue, et cela pendant 11 longues minutes. J'étais imperturbable, comme si j'étais seul, devant cet écran géant, sans que quiconque ne puisse m'interpeller. Puis, le son revient chez moi. 39è minute, coup franc pour Lens. Bellegarde va le tirer. Dans le mur dijonnais, j'aperçois une tête familière, celle de Florent Balmont. Tout de suite, je me moque, disant qu'il y a peut-être meilleur choix, le milieu dijonnais n'étant pas le plus grand joueur du club (par la taille). Au final, Bellegarde détourne son ballon du mur qui vient se loger sur la tête de Duverne, qui propulse le cuir dans les cages (39e, 1-1). Explosion de joie dans la fanzone. On saute, on hurle, les boissons fusent, je finis torse-nu dans cette marée humaine, alors que je suis de nature très pudique. C'est incroyable. Je pense n'avoir jamais vécu une ambiance pareille. À la pause, il y a égalité, on respire, je me rhabille, et on attend le dénouement...

De l'explosion de joie, à l'explosion de tristesse

La seconde période débute avec les Corons, que j'adore hurler comme un fou. Une seconde période bien plus tendue que la première, où le match se montre très indécis. Une indécision qui dure 25 minutes. Sur une passe de Fortes, Vachoux se troue et offre un but cadeau aux Dijonnais, ça fait 2-1 (70e, 2-1). La stupeur est présente sur Lens, où on se questionne, et surtout, on se met à avoir peur, voyant le temps de jeu restant. On essaie de rester serein, à encourager de (très) loin notre équipe, mais les Dieux du football ne se sont pas montrés cléments et nous portent le coup de fatal. Juste avant le temps additionnel, sur une balle en profondeur pour Sliti, Vachoux sort de sa surface, veut jouer le ballon, mais boxe Fortes qui venait en effort. Un coup qui profite à Sliti, qui marque et scelle la rencontre (90, 3-1). C'est terminé, Lens ne montera pas en Ligue 1. 
Je n'y crois pas trop, je suis sous le choc. Des supporters quittent la fanzone, et moi, je suis assis sur le parking qui se vide, en attendant le coup de sifflet final et peut-être un miracle, mais il n'est jamais arrivé.
C'est fini. Les espoirs sont éteints. Avant de regagner la voiture pour la Somme, je lâche quelques larmes, celles que tous les supporters déçues connaissent, et je m'en vais me chercher une ultime bière pour oublier (le football est dangereux pour la santé). Coup du sort, la moins chère n'est plus disponible, nouveau coup dur pour moi...

Le retour dans la Somme est long, pénible, et je mets vite à l'évidence qu'il faut oublier ça pour aller de l'avant, ne pas se laisser avoir par les “Et si Leca était titulaire ?”, “Et si Vachoux avait été dans un bon jour ?” qui ne servent à rien.

Ainsi va le football, et le sport en général. Malgré la défaite, j'ai encore été témoin de la ferveur que génère le RCL, même en Ligue 2, une ferveur qui montre que le public lensois est encore aujourd'hui, l'un des meilleurs du pays.
C'est dans ces moments-là que l'on voit qu'un supporteur, un vrai, suit son club, dans la gloire comme la défaite, et j'ai rarement été aussi fier d'être un sang et or
C'est cet engouement qu'il faut pour retrouver la Ligue 1 et briller dans ce championnat, pour retrouver les gloires que m'ont raconté les anciens, moi qui suis né un an après le titre de 98.

Romain P.

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