Gervais Martel : « On joue « comme des patates » depuis le début de l’année »

Gervais Martel RC Lens 05A quelques jours de la Sainte-Barbe; la fête traditionnelle des mineurs, Gervais Martel était l'invité exceptionnel ce vendredi matin de RBM 99.6FM, la radio du Bassin Minier et partenaire de MadeInLens.com. Fils d'un ingénieur des mines, le président du conseil d'administration du RC Lens a gardé de nombreux souvenirs et de nombreux liens avec l'époque de l'extraction minière et a forcément évoqué le club Sang et Or.

Le désormais ex-président du club lensois se livre au sujet de ce jour de 1990, où il a emmené l'effectif du Racing au fond du 9-9bis à Oignies et revient aussi sur l'actualité récente du RC Lens et sur sa situation personnelle au sein du club.

Vous avez fait descendre l’équipe au fond de la mine en 1990...

« J’ai fait descendre l’équipe parce qu’on jouait « comme des patates ». Ca nous arrive, et ça nous arrivera encore malheureusement, mais  je trouvais que l’on ne respectait pas assez les valeurs. A l’époque, on jouait très mal et j’ai dit : “vous ne vous rendez pas compte, on est dans une région où les gars donneraient tout pour vous”. J’ai dit à mon père qu’il fallait faire descendre l’équipe. Il m’a dit : “non mais tu n’es pas bien, je ne peux pas faire ça” et j'ai répondu : “écoute, débrouille-toi pour nous y faire aller”.

Et on est partis là-bas, à la Fosse 9 de Oignies. On est descendus et c’est marrant parce qu’il y a deux joueurs - je ne me souviens plus du nom du deuxième mais il y en a un, je m’en souviens bien, et pourtant il avait je dirais le physique de l’emploi -  c’est Roger Boli, que j’adore d’ailleurs, et qui avait refusé de descendre. Il avait pris un petit coup de chaud avant, je pense. On est descendus et cela a été exceptionnel parce que les joueurs, quels qu’ils soient, quelle que soit leur origine, se sont retrouvés au milieu de ces gens respectables. Derrière, cela a été beaucoup mieux tout le reste de la saison. Je ne vous dis pas que l’on a gagné tous les matches 5-0, mais, après, cela a été beaucoup plus facile de parler de leur environnement et de trouver un respect de l’environnement… Et je pense que cela a peut-être été un déclencheur, l’année suivante, où on est montés en Ligue 1.

Paradoxalement, il y a à peu près un mois, j’ai réuni l’ensemble des joueurs et je leur ai fait voir le film qui avait été fait par la Région il y a deux ou trois ans sur les valeurs du Bassin Minier. Je leur ai expliqué un petit peu ce que c’était et je leur avais parlé. Même s’il y a beaucoup de nationalités différentes, je leur avais expliqué ce qu’on était, ce qu’était Lens, pourquoi à Lens il y a autant de spectateurs, pourquoi il y a cette solidarité, pourquoi il y a cette passion, pourquoi il y a cette tristesse, pourquoi il y a cette envie. J’avais fait le discours avec la lampe de mineur de mon père que j’avais récupéré à sa mort et je leur avais expliqué un petit peu tout ça. Je ne sais pas s’ils l’ont tous bien compris, parce que maintenant la société évolue, les langues évoluent mais c’était important de pouvoir le faire.

Heureusement qu’il reste Eric Sikora comme porteur du blason, il ne reste plus beaucoup de personnes natives du secteur…

« Il ne reste plus beaucoup de personnes du secteur mais c’est vrai que « Siko » est un ambassadeur exceptionnel. Il connaît bien ce que l’on dit. Mais ne serait-ce que pour bien comprendre pourquoi on fait autant de monde à Bollaert quand même alors que l’on a quelquefois des prestations, il faut quand même être réalistes, qui sont limites. C’est cette chaleur qu’on retrouve à Bollaert, et moi je suis certain que cela provient aussi de nos ancêtres, de notre histoire. Je dirais que les plus belles saisons de Bollaert, c’est quand on était en difficulté les saisons précédentes où les gens étaient avec nous. Souvenez-vous, on a été champions de France en 1998, on a failli descendre en 1997 par exemple. Le public et les supporters, qui sont pour beaucoup issus des corons : c’est bien qu’on chante Les Corons chaque match avec Pierre Bachelet. Ils sont là quand ça ne va pas bien et ça, c’est quand même unique en France. »

Comment va le Racing Club de Lens ?

« On peut faire deux analyses. On joue « comme des patates » depuis le début de l’année, il faut être clair : on s’est trompés dans le recrutement pour diverses raisons, variées et concrètes. Cela va un petit peu mieux parce qu’il ne faut pas oublier qu’on était encore relégables il y a quinze jours, trois semaines. Là, on est toujours dans une position qui est compliquée mais on a des équipes derrière nous, on rattrape Nancy, mais il reste beaucoup à faire. Cela veut dire qu’il faut être extrêmement concentrés sur nos résultats à venir en championnat. Tout le monde dit “ça va aller, il n’y a pas de problème”. OK, en football, on en voit d’autres… Il faut continuer à travailler comme on le fait. On reste souvent notre sur notre déception. On fait un bon match à Nancy mais on joue seulement sur la seconde mi-temps ; on doit gagner à Châteauroux, on ne le fait pas ; au Havre on est mièvres ; on fait un meilleur match ici mardi on gagne contre Ajaccio. Mais il reste beaucoup à faire. Malheureusement, on a la blessure de Clément Chantôme : je crois que c’est une blessure au genou et il va faire des examens complémentaires aujourd’hui. Après, je compte sur Eric Sikora, sur l’ensemble du staff et les joueurs pour prendre conscience qu’on n’est pas à notre place. Mais ce n’est pas ça qui donne des points supplémentaires. »

Vous connaissez mieux l’actionnaire que nous puisque nous n’avons pas eu beaucoup d’occasions de le rencontrer… On est toujours à la recherches de personnes qui ont les « reins » solides, qui peuvent permettre au club de recruter, d’aller de l’avant, et de tenir la distance. On avait dit une montée dans les deux ans, mais ce ne sera pas le cas, où il y a peu de chances…

« Très peu de chances. Mais aujourd’hui, c’est quelqu’un de bien, ça je peux le dire aux auditeurs : c’est quelqu’un qui est perturbé évidemment par notre début de saison. Je l’ai dit tout à l’heure : on a fait une dizaine de recrutements qui n’ont pas été très heureux, c’est le moins que l’on puisse dire, mais il reste solidaire avec nous. Je l’ai eu après le match de mardi soir, il était content qu’on ait pu gagner. Maintenant, il se reporte déjà sur le match du Paris FC et le match de Coupe de France. C’est quelqu’un, même si on va rater l’échéance vraisemblablement cette année, qui sera encore avec nous dans les années à venir parce que ce n’est pas quelqu’un qui est farfelu : c’est quelqu’un qui a les moyens mais qui ne jette pas non plus l’argent par les fenêtres, qui attend qu’on puisse revenir au plus haut niveau mais, par des choses normales, pas en faisant 70 millions d’euros de recrutement sur l’année. Cela ne correspond pas à notre club, mais on doit être largement meilleurs que ce que l’on a fait cette année, ça c’est clair.  »

Quel est son objectif ? Car reprendre un club de football, cela coûte plus que ce que ça rapporte…

« C’est quelqu’un qui est déjà dans le football. Il a des entreprises en Amérique du Sud, il a un club en Colombie qui s’appelle Millonarios. Vous qui connaissez le football, c’est un club où a joué Di Stefano qui était l’un des plus grands joueurs du monde, qui a joué au Real Madrid. Ensuite, il s’intéresse beaucoup au football. Quand on avait été le voir avec l’Atletico Madrid par rapport à Lens, il avait été vraiment scotché par l’ambiance qui existait, par cette ferveur qui était autour de Lens. Aujourd’hui, je peux vous dire : il est “piqué” par Lens ! Je vois ses enfants qui ont le maillot du RC Lens sur eux, c’est quelqu’un qui est piqué par Lens : il ne faut pas être inquiets pour l’avenir… Il faut surtout être inquiets par rapport à notre potentiel sportif cette saison et faut essayer de revenir dans des eaux calmes le plus vite possible. »

A quelle place pensez-vous que Lens puisse finir cette saison ?

« C’est difficile à dire, mais je pense qu’avec l’écart qui est fait déjà aujourd’hui, c’est presque irrémédiable, sauf en ayant 7 ou 8 victoires en suivant… Mais je pense qu’on devrait assez rapidement, jespère, revenir au milieu de tableau pour pouvoir préparer la saison prochaine. Il faut être réaliste dans le football. »

Que devenez-vous dans cette organisation ? On a, à certains moments, pas tout compris de ce qui a été dit…

« C’est vrai que la communication était un peu compliquée. Simplement, je suis allé voir l’actionnaire en lui disant “écoute, il y a des jeunes qui sont arrivés, notamment Arnaud Pouille, Fabrice (Wolniczak, ndlr.), ce sont eux qui doivent diriger le club au jour le jour”. Moi je reste là, à côté d’eux, quand ils ont besoin - et Dieu sait s'ils me consultent - , ils me demandent mon avis, mais c’est eux qui doivent être dans l'opérationnel. Moi, je suis resté Président du board avec les actionnaires, Président du conseil d’administration, donc Président du club. C’est moi qui travaille aussi sur les gros comptes. Vous avez vu que l’on a signé une grosse entreprise régionale et internationale qui est Auchan. J’ai commencé ma carrière à Auchan… Je suis un peu tous ces gros comptes-là et puis aussi le développement, peut-être, du club à l’international sur les années à venir. Cela me convient très bien, en ayant gardé le côté “terrain” qui aujourd’hui me donne l’adrénaline par rapport au RC Lens. »

Propos recueillis par Pascal Guislain (RBM 99.6FM) pour MadeInLens


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