La parole à : Sylvain Tanière

Sylvain Taniere 01Régulièrement, au travers de notre rubrique « La Parole à », MadeInLens vous propose des interviews de personnalités qui nous apportent leur point de vue sur le Racing Club de Lens ou le football en général.

Si le nom d'Edmond Tanière ne vous revient pas forcément en tête, l'air de Tout in haut de'ch Terril vous est forcément familier si vous êtes un ch'ti. A l'occasion des 110 ans de la catastrophe de la compagnie des Mines de Courrières, le RC Lens et ses supporters avaient rendu un vibrant hommage aux 1 099 mineurs morts ce 10 mars 1906 lors du match entre les Sang et Or et Clermont.

Ce soir-là, Sylvain Tanière, le fils d'Edmond Tannière, avait entonné la chanson phare de son père sur la pelouse du stade Bollaert-Delelis. Pour MadeInLens.com, il revient sur la carrière de son père et sur ce moment exceptionnel passé lors de cet hommage.

Sylvain Tanière, vous êtes le fils d’Edmond ?

« Exact ! Depuis 43 ans. Mon père a été connu en 1981 par la sortie d’un disque qui a fait un tabac, « Tout in haut de’ch terril ». A cette époque-là, il tenait un café à Fouquières-les-Lens qui s’appelait le « Schmilbick ». C’était un café qui se transformait en dancing le samedi et le dimanche. Il suffisait de peu de choses pour mettre de l’ambiance. Une petite scène dans un coin, un accordéon et c’était parti. Toute personne qui voulait chanter, jouer de la musique le pouvait ! Personnellement, j’étais trop petit, mais beaucoup de personnes se rappellent de cette ambiance particulière et des bons moments passés là-bas ! »

Votre père était musicien ?

« Oui, il a été chef d’orchestre à 18 ans. Il jouait de l’accordéon. Il a commencé tard. Il avait 13 ans. Mais il a vite progressé. Et comme il a bien progressé, il est allé sur Paris, chez Paul Beuchère, pour se perfectionner. C’est par cette formation qu’il est devenu l’un des dix meilleurs accordéonistes de France. »

Edmond Tannière, c’est un homme à tube !

« Et pas qu’un ! De Tout in haut de ch’terril, M'lampiste, Eune goutte eud’jus... Les tomates n’est pas une chanson de mon père mais une chanson de Roland St Yves. IL y a eu aussi Mi j'brais toudis quand j’sus pompette ! Les chansons se sont succédées pendant 10 ans. ».

Étaient-elles toutes des chansons de ton père ?

« Pour l’essentiel, oui. En 1993, Renaud a repris les chansons de mon père dans son fameux disque Renaud cante el'Nord. »

Dans les années 1980, on vendait du 45 et du 33 tours. Combien en a-t-il enregistré ?

« Quatre 33 tours et onze 45 tours ! Ce n’est pas rien. Et plus d’un millions de 45 tours avec Tout in haut de ch’terril ! Il y a eu deux maisons de disques. La première Divox et ensuite EDS. Eds a produit Claude Barzotti, Peter et Sloane… »

Cette aventure s’est terminée brutalement…

« Oui, brutalement. Mon père est parti faire un tour en mobylette. Il a eu un accident. C’était en 1991, nous fêtons le 25e anniversaire de sa disparition. Mon père roulait rarement en cyclomoteur. Une des rares fois où il l’a fait, il a eu un accident. »

Vous avez pris le relais…

« Oui et non ! J’accompagnais mon père sur scène dès 14 ans, je suis batteur. Mon frère jouait aussi avec nous. Mon frère était batteur et s’est mis à la guitare basse… A trois, on jouait, on animait, on jouait. En juillet - août, nous étions sur le grill. Mon père était à l’accordéon et c’était parti ! Prendre le relais à une telle équipe est compliquée. A l’âge de 18 ans, j’ai donc perdu mon père. A chaque fois que c’est possible, on me demande de chanter une chanson. Je le fais, juste histoire de perpétuer le travail de papa. »

Votre père était mineur ?

« Il l’a été pendant 7 ans. Son père ne voulait pas qu’il soit mineur. Il a d’ailleurs écrit une chanson « Non, t’iras pas à l’fosse » . Dans cette chanson, il raconte son parcours, il a été boulanger, marchand de glace, monteur de grue… Quand il parlait du métier de mineur, il savait de quoi il parlait ! »

Vous et le show-business…

« Ce n’est pas ma vocation première. J’ai un métier à part entière mais le week-end, si l’occasion se présente, j’en profite pour chanter et reprendre les chansons du père ! J’aime raviver sa mémoire. Je pense qu’il fait parti de notre patrimoine. »

Sylvain Taniere 02Trouve-t-on encore les disques ?

« Sur les marchés aux puces, dans les brocantes. Il y a aussi la boite Defer à Armentières. Il s’agit surtout de microsillons. En CD, deux compilations ont été éditées par Sony Music France. L’une d’elle comporte deux chansons que mon père a enregistrées avant son accident et qui n’étaient jamais sorties… Les noms ? « Gueules noires » et « C’est loin tout cela »… »

Aller chanter au stade Bollaert-Delelis pour les 110 ans de la catastrophe de la compagnie des Mines de Courrières, c’était prévu ?

« Pas du tout, cela s’est fait à la dernière minute. Cela m’a fait un plaisir énorme. J’ai été très fier de chanter devant 30 000 personnes. J’ai été très fier de chanter une des chansons de mon père. J’ai eu la peur au ventre avant d’entrer dans ce lieu mythique… Etre seule, au milieu du stade, ce n’est pas facile. Etre là également pour la commémoration de la catastrophe de Courrieres, ce n’est pas rien. Il ne faut rien oublier. Ce sont nos racines. J’ai été prévenu la veille de cette demande, j’étais libre mais si cela n’avait pas été le cas, je me serai débrouillé. J’y retourne les yeux fermés ! Sans problème. Quel bonheur ! »

Comment voyez-vous l’avenir ?

« Reprendre les chansons d’un monument n’est pas simple sur la durée. N’oublions pas que mon père a sorti ses disques en plein âge d’or du microsillon. Tout in haut de ch’terril est entré dans le patrimoine du Bassin minier, tout le monde connait le refrain, tout le monde connait l’air. J’espère apporter d’autres chansons, d’autres textes, j’y travaille. Mon problème est la réponse à une question : « comment est-il possible de faire mieux que ce qui a été fait ? » Je vais voir avec le temps. Je suis dans l’hommage à mon père, je verrai ensuite si c’est possible. »

Propos recueillis par Pascal Guislain pour MadeInLens

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